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Et ben, c’est dire qu’on ne l’attendait pas celui-là. Vingt ans plus tôt, Da Capo a fait paraître un premier album qui voyait les choses en grand
Les frères Paugam excellaient en matière de pop baroque et épique et une avalanche de disques sublimes s’en est suivie par la suite. 
Après leur dernier disque Out Of Spain, les voilà qu’ils récidivent avec "Oh, My Lady" incroyablement déchirant et romantique.
"We Have Been Waiting Here", voilà qui a le mérite d’être dit. Le premier morceau de l’album débute de la plus belle des manières avec sa section 
de cuivres bien triomphante et qui dessine parfaitement l’ambiance générale de l’opus qui se veut solennelle et douce-amère ( et ta soeur !). La suite est 
du même acabit avec les morceaux chargés en mélancolie comme « Oh, My Lady », « Cold In The Night » ou encore « Beauty From You » où l’on a 
l’impression d’être à la proximité des musiciens et de la voix désabusée d’Alexandre Paugam rappelant quelque peu Chris Bell
Et quel magnifique solo de trompette à la fin !


Ce retour en grâce est parfaitement salué tant le groupe du Puy-en-Velay incorpore d’autres sonorités à leurs compositions épiques. Ainsi, ce n’est pas 
un hasard si l’on croise des influences de musique classique sur la très cinématographique « Heal Me » ou même du jazz sur la vibrante « Far Cry » 
comprenant un long solo de cuivres et d’un rythme tribal bien hypnotique. Et quand on se laisse imprégner de ses mélodies rêveuses et poignantes
voilà que l’on se prend une bonne dose d’énergie pure et dure en toute fin d’album avec le rock mordant du bien-nommé « Violent World ».
Une intensité incroyable se dégage à travers ces dix compositions qui se trouvent à mi-chemin entre Robert Wyatt et David Bowie et les fantômes de Cohen 
qui détonnent toujours autant après plusieurs écoutes attentives. Le come-back des frères Paugam est salué par ici, hé oui .



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« Oh, My Lady » est un disque de résistance, un disque du refus. Résistance au temps qui passe et refus de voir disparaître cette vision historique 
des musiques populaires. Ainsi,, pour ne citer qu’eux, survolent ce disque diablement sombre et pourtant furieusement passionnant. Le groupe 
Da Capo et son co-fondateur, Alexandre Paugam, sont décidément un cas à part en France. Sur ce nouvel album, il n’en a toujours pas fini avec ses 
obsessions qui, depuis un premier album en 1997, conjugue une exigence évidente et une inspiration salutaire.

Ce disque n’est pas nécessairement une réponse à toutes ces malheureuses disparitions en cascade. Pourtant, à la triste fin annoncée d’une époque 
artistique et d’un mythe qui s’écrit depuis le début du siècle dernier, Da Capo répond avec le cœur et surtout avec sa musique. Un album intègre et 
amoureux comme « Oh, My Lady » aura toujours vocation à dépasser sa propre genèse et à tracer son propre chemin. Mais qui est cette gente dame ? 
À travers ce personnage de fantasmes et de désir, le compositeur dialogue avec cette musique rock que le groupe ne cessera jamais de convoiter comme 
une maîtresse de toujours. Le nom même de ce trésor caché du Puy-en-Velay s’inscrit dans cette généalogie, qui fait référence à la discographie fascinante 
du fameux groupe LOVE du légendaire Arthur Lee.


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Dès le début de « Oh, My Lady », Alexandre Paugam s’autorise des passe-droits, en jouant avec les codes de la pop, du rock et du folk. Ainsi, comme un pied 
de nez libérateur,voir deux oreilles ! « We Have Been Waiting Here » en fait déjà trop, comme si nous avions perdu l’habitude. Sur ce disque, l’émotion est un 
animal en cage, qui ne demande qu’à s’évader. À l’instar de Calexico, Da Capo s’ouvre des espaces immenses et intemporels à travers une section de cuivres 
élégante et subtile, qui donne une coloration inédite, pour une formation d’ailleurs constituée pour l’occasion. Dès ce premier titre, le propos voyage, fait des détours 
et joue avec notre imaginaire. Pourtant, aucune forme de calcul n’est à l’œuvre. La musique, et en particulier le chant, semblent être en permanence sur le fil du 
rasoir. Le groupe se met véritablement à nu, quelle que soit la mise en scène qui sied à chaque morceau. De somptueux tableaux comme Gidelo prennent ainsi vie, 
dans d’étranges lieux hors du monde et hors du temps.

Sur le titre éponyme, un cabaret, parcouru de souvenirs poussiéreux, ressuscite un piano maladif avant de fondre dans les fulgurances de la distorsion. L’émotion 
déborde et se démultiplie. Da Capo se donne le droit de pleurer l’amour, de chanter la tristesse comme de crier le désespoir, sans véritablement de retenue
Conviction artistique totalement assumée qui transporte sur ce nouveau disque : l’expression du vague à l’âme dans une forme de « résilience » extrêmement touchante. 
Bien plus encore, certains passages nous font invariablement songer que la frontière entre la musique profane et sacrée est décidément très mince. Exemple flagrant, 
parmi d’autres : cette lente déclaration en forme de litanie, nourrissant le corps de « You Really Don’t Know ».



Autant de pop songs qui font mouche dès les premières notes et rendront dingues bien des programmateurs radio dignes de ce nom !. Cette liberté de ton envahit !
progressivement la fin du disque, donnant, une nouvelle fois, la preuve que des personnages atypiques aussi créatifs et libres que Robert Wyatt rayonnent encore et 
toujours sur la musique indépendante, en l’empêchant de devenir ce vulgaire objet marketing dénué de sens et d’humanité. Il faut certainement, comme pour tous 
ces grands opus qui siègent aux meilleures places de nos classements et étagères, de nombreuses écoutes pour maîtriser l’incroyable force qui se dégage des 
morceaux de « Oh, My Lady ». Da Capo, une nouvelle fois affranchi de bien des contraintes, mérite, comme tous les vrais artisans de la cause indépendante
un profond respect et une attention à la hauteur de ses merveilleuses intentions artistiques.



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